Siegfried Kessler







 

 

 

Siegfried Kessler

 

 

Bravo à toi, Siegfried. D’être mort comme qui dirait dans ta baignoire ! Puisque, selon les apparences, tu serais tombé de ton bateau, dans le port de La Grande-Motte, alors que, peut-être bien, tu avais un coup dans le nez, mais quelle importance maintenant ?

 

C’est là que tu vivais depuis une vingtaine d’années. Tu avais soixante et onze ans. Il y a deux choses que tu savais fort bien. La musique, d’abord. Et deuxièmement que tout le monde t’aimait. 1) La musique : chacun savait, chacun disait – et en particulier tes pairs dans le jazz - que tu étais le plus grand pianiste, entre tous. 2) L’amitié, je n’en dirai pas plus, car, à nos âges, il faut se méfier du chagrin comme de la grippe.

 

Tout date de notre jeunesse. Le Navigator, rue Galande, crêperie et rendez-vous nocturne de notre bande de chanteurs et de musiciens. La belle Michèle Baylet, en patronne qui savait se faire respecter. Corine Léonet, qui assura (avec l’assistance de Marie Castets) pendant plusieurs années le secrétariat de quelques chanteurs, dont j’étais, et celui de musiciens de jazz, parmi lesquels Didier Levallet, et toi, Siegfried. Et tu nous accompagnas, Gilles Elbaz et moi, dans nos disques auto-produits et nos virées improbables à l’autre bout du monde, toujours avec gentillesse, fantaisie et efficacité musicale.

 

Tu étais une sorte de décalé génial, vivant comme en apesanteur sociale. Tu te plaisais à être un accompagnateur. En jazz, tu ne voulais pas être le leader, mais tu aimais être le deuxième homme recherché. Tu fuyais par-dessus tout, et c’était étrange, la gloire à laquelle ton talent te destinait. Dans ta DS commerciale, une ancienne ambulance récupérée, tu sillonnais l’Europe et tes fantasmes. Un chien. Sans nom, je crois.  

 

Merci de ton talent et de ton amitié. Toi, ta gloire commence. Pour nous, avec l’hiver qui s’augmente, le paysage continue à diminuer.

JB (28/01/2007)