Les cabarets "rive-gauche" du quartier Mouffetard dans la décennie 1970
par Jacques Bertin
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Les cabarets "rive-gauche"
du quartier Mouffetard dans la décennie 1970
Venant après la période d'après
guerre, dite de Saint-Germain-des-Prés ou encore de la Rive gauche,
La période précédente, celle de la Rive-gauche, a été relatée, quoique partiellement et superficiellement, et toujours d'un point de vue événementiel. L'étude artistique, économique, sociologique reste à faire ; mais tant que la chanson française sera considérée comme rien par les chercheurs, il est vain d'attendre. Cette période s'ouvre au milieu des années soixante. On voit fleurir les cabarets. Nous nous concentrerons ici sur un quartier : celui de la Contrescarpe. Notre enquête - imparfaite et parcellaire - relève, dans la rue Mouffetard, la rue Descartes, la rue de la Montagne Sainte-Geneviève et les alentours, au moins 17 lieux de spectacles. C'est un chiffre énorme. Et, bien sûr, historiquement rare. A lui seul, il incite à l'intérêt. Certains de ces cabarets sont un peu plus anciens, comme le Cheval d'or ou la Contrescarpe. La Maison pour tous, elle, est presque centenaire. D'autres lieux seront éphémères. Tous ensemble ils témoignent. Nous appelons nos lecteurs à… témoigner à leur tour, afin que ces faits ne tombent pas dans l'oubli, ou dans la déformation légendée. La chanson est un art méprisé ; elle n'a pas de légitimité culturelle, et donc universitaire. "L'étude d'un sujet discriminé est discriminée" dit Edgar Morin. Il nous faut donc, public, nous emparer des sujets "discriminés", avant qu'il ne soit trop tard. Nous substituer à la recherche officielle, afin, peut-être de la motiver… Grâce à l'outil Internet, on peut, en ce moment, publier en passant par dessus les milieux de l'Université et de l'édition traditionnelle et, ainsi, rencontrer le public. Ce peut être une façon de se saisir de la recherche. Nous nous excusons de ne présenter ici que des bribes. Nous comptons sur notre public, nos lecteurs, les témoins de l'époque, les artistes eux-mêmes, pour nous apporter les informations complémentaires et tous les correctifs nécessaires. Le regroupement de ces cabarets autour de l'axe de la rue Mouffetard ne fut pas l'effet d'un complot. Nous tentons, en quelques lignes en fin de texte, de donner une explication à ce phénomène qui n'est pourtant pas tout-à-fait le fruit du hasard. Nous avons porté sur un plan du quartier, et numérotés de 1 à 17, une liste de lieux. Quelques informations suivent l'énoncé de chaque enseigne. Nous pensons que le futur nous permettra de combler les manques et corriger les erreurs. 1) Le port du Salut. Tenu par
Jacques Massebeuf. 2) Le Navigator, crèperie
: Lieu de rendez-vous nocturne de nombreux artistes. Tenu par Michèle
Baylet et Christian Renaud. Eve Grilliquez y enregistrait Libre Parcours,
son émission radio. 3) Le Discophage : Boite sud-américaine. Bernard Lavilliers y chantait. 4) La Méthode. Jean-Luc Juvin et Coluche y firent le service. Lavilliers y chantait... 5) Le Bateau Ivre. Tenu par
Pol Serge, lui-même ACI. 6) Le
Cheval d'or : Tenu par Léon
Tcherniak. 7) Le Rancho Guarani : Les Guaranis. 8) La Contrescarpe. Tenu par
Arlette Reinerg. De 1955 au début des années 70. 9) Le bus : un bus-théâtre
(33 places assises), ancien bus roulant dans la France et qui termina
là sa carrière, dirigé par Jack Messi. 10) Maison Pour Tous ou Théâtre
Mouffetard : le centre du quartier. Lieu d'animation depuis le
début du siècle (Université populaire, etc…) L'un
des Quatre Barbus, Pierre Jamet, était monté sur la scène
de la Mouffe, alors qu'à huit ans, il était louveteau. Les
Barbus ont répété plus de dix ans au cinquième
étage de la Maison pour tous. 11-12-13) Presque côte à côte, dans des caves, et lancé dans le giron de la MPT : Le Cabaret d'art et d'Essai (1969 à 1973, lancé par Karine et Christian Stalla -ce dernier, du duo Michelle et Christian- ; y passèrent notamment : Coluche, Alain Souchon…), le Troglodyte (théâtre Le Petit Mouffetard, puis Troglodyte -coin rue Ortolan, cave voutée du XIIIème- dirigé par Chantal Werner et Henri Gilabert ; parmi les premiers spectacles présentés : Higelin, Fontaine et Areski), Le Pétrin (cabaret associatif réunissant une soixantaine d'artistes, lancé par la MPT et dirigé par Gilles Naudin et Jack Messy puis Alain Combes ; dans la cave d'une maison en ruine -un immense pétrin au rez-de-chaussée, impossible de le sortir- : France Léa, Gilles Elbaz, Germinal, Gilles Servat, Julien Barrias, Denis Wetterwald, Patrick Denis, Jo Schmelzer, Gilbert Sagel, Daniel Clark, Pierre Trapet, Henri Dès, Jean Vasca, Jean Sommer, Bernard Lavilliers, Francine Reeves, Hubert-Félix Thiéfaine, Jean-Louis Caillat, le Théâtre à bretelles, Theophile, Marianne Sergent, Gérard Pierron, Douby, Henri Guybet, Djamel Allam, Jacques Doyen, Ben Zimet, Jacques Barthes, Paul-André Maby, Bernard Meulien…) 14) Le Tripot. Lancé par Corine Léonet, Stephan Meldegg et Gérard Le Cardinal. 20 places dans la cave. Jean Vasca, Jacques Bertin... 15) Théâtre de l'Epée de bois. Théâtre. Lancé sur un terrain vague par la MPT. 16) La Vieille Grille. Tenu par Maurice Alezra. Jacques Higelin, Daniel Lalou, Ben Zimet... 17) L'Ecole buissonnière (10 rue de L'arbalète). Cabaret lancé par René-Louis Lafforgue, et dirigé, après sa mort, par sa veuve Claudie. Guy Bedos, Paul Préboist, Pierre Louki, Maurice Fanon, Christine Sèvres, Béatrice Arnac... Il peut être ajouté qu'en face du Bateau Ivre, on chanta quelques jours dans la cave d'un marchand de chaussures. "Je passe chez Chaussures", disait le chanteur Germinal. Et on chantait dans certains restaurants du quartier. Citons le Maravedi, place Sainte-Geneviève, où la chanteuse Mara accueillait entre autres Francisco Montaner, Colette Magny, Francine Reeves. A côté du Bateau Ivre, l'Académie de guitare publiait une revue sur la guitare et la chanson, et décernait un prix annuel. Dans son Club plein vent chantaient Jean Vasca, Francisco Montaner.
Remerciements à Francine
Reeves, à Montréal, pour sa contribution. Jacques Bertin - juillet 2005 |
Proposer un texte à la revue Les Orpailleurs